JUKEBOX : [VirtuouS] ou l’art de la justice par Dreamcatcher

 Les 7 membres continuent à cimenter leur place à part dans la K-pop avec cet album autour de l’art de la justice par Dreamcatcher [VirtuouS]. Autour d’une title track épique nommée “JUSTICE”, Dreamcatcher comptent bien triompher du mal et des cauchemars qui s’abattent sur elles et sur nous. 

Article co-écrit par Mélanie et Cilly

Après la dystopie et l’apocalypse, Dreamcatcher ont ouvert une nouvelle ère de leur carrière et de leur storyline avec l’album [VillainS] dans lequel elles explorent un univers alternatif digital. Si les membres étaient alors des “villains” (“méchantes”) venues nous sauver d’un glitch dans la matrice, avec [VirtouS] elles sont désormais prêtes à se battre. Ce dixième mini album, sorti le 10 juillet 2024, ouvre donc un nouveau chapitre plus combatif aussi bien visuellement que musicalement.

Un teasing digital classique…

Si le teasing de [VillainS] a mis en avant des messages codés et des énigmes à élucider sur les réseaux sociaux, notamment autour de la recherche d’une couronne et du sauvetage d’une victime, celui de [VirtuouS] fut beaucoup plus léger. En effet, nous nous sommes contentés ici de photos teasers et de contenus classiques (voir ci dessous).

Particulièrement notables, les tenues en dentelle noire du second concept qui placent Dreamcatcher dans une esthétique sombre et presque ensorcelée, rappellent parfaitement leur direction artistique originelle : celle des “attrapeuses” de rêves troublantes, voire effrayantes.

Le 1er juillet, elles révèlent la tracklist de cinq nouvelles chansons, dont une intro, toutes à nouveau écrites et composées par Ollounder, leur producteur habituel. Il est cette fois-ci accompagné par Door (qui travaille également pour Ateez) et Tankzzo. . L’équipe de production est donc bien rodée à l’univers de Dreamcatcher. 

Comme à leur habitude avant chaque comeback, Dreamcatcher présentent le projet avec différents formats vidéo.

Un lyrics spoiler de “JUSTICE”

Un highlight medley des morceaux de l’album

Certain.es n’aiment pas être spoilées mais d’autres adorent déjà anticiper quelles chansons seront les plus appréciées

et la “dance preview”

qui montre un morceau de la chorégraphie mais révèle aussi la mélodie du refrain de “Justice”

… qui s’accompagne pourtant d’inventivité à la promotion

Avec un teasing simple, [VirtouS] s’accompagne pourtant d’un MV riche en éléments scénaristiques et interpolations avec d’anciens titres du groupe. Ainsi, les Insomnias (fans de Dreamcatcher) peuvent toujours s’adonner à des théories et de la recherche d’indices. 

La promotion de l’album s’élargit à l’événementiel puisque l’agence a prévu, dès le lendemain de la sortie, une réunion avec les fans autour d’un escape room game en présentiel. C’est au Real World Seongsu à Séoul que les Insomnias pouvaient jouer et devenir un personnage principal de l’intrigue de Dreamcatcher. Alors qu’elles laissent des indices via des “Mystery Codes” (codes mystères) à chacun de leurs comebacks, les fans ont pu tenter de les déchiffrer avec leur smartphone lors de cet escape game. De quoi ravir les adeptes de théories et de jeux d’énigme. Il s’agit d’une manière originale d’anticiper l’engouement autour de la sortie. Les fans peuvent alors retrouver des indices qui ont toujours fait partie des teasings du groupe.

NOTRE AVIS SUR CE MINI ALBUM

Intro : 7’Dreamcatcher

Dreamcatcher nous offre une fois encore une introduction d’album qualitative, très efficace  pour entrer dans le projet et son univers musical. Cette fois-ci, l’intro dure 3’55min, ce qui est particulièrement long et assez rare pour le notifier. Ces presque quatre minutes de morceau instrumental savoureuses sont représentatives de la couleur musicale de Dreamcatcher, très inspirée par le j-rock. 

L’intro commence de manière élégante et douce avec une mélodie au piano, qui évoque la musique japonaise des années 1980. Elle rappelle une entrée dans un jeu vidéo ou encore un début d’épisode d’anime. Le piano est rejoint par la basse puis la guitare qui ajoute de la profondeur et de la noirceur à la mélodie originelle. L’entrée de la batterie, au rythme très rock, au milieu du morceau, alourdit davantage l’atmosphère qui en devient épique. Dès le début de l’album, Dreamcatcher semblent prêtes à se battre et  prendre les armes grâce à des sonorités heavy rock. Celles-ci sont pour autant à relativiser car nos guerrières sont habitées d’une énergie chaleureuse. En effet, on peut le comprendre grâce au contraste entre la douceur du piano et la force des percussions et des cordes. Certes, elles sont combatives mais à l’égard du bien : de vraies héroïnes. 

Title Track : JUSTICE

Les héroïnes, jusqu’alors absentes par leur voix, arrivent dans l’album avec “JUSTICE”, un titre aussi épique qu’émouvant. Il commence directement avec des percussions et voix tribales en fond sonore pour accueillir la voix limpide de JiU. Son timbre est efficace et parfaitement mixé pour introduire une title track à laquelle on accroche dès les premières notes. Le pré-refrain arrive en puissance avec de la guitare, des percussions fortes et la répétition des mêmes phrases plusieurs fois “We build the barrier, build the barrier / Build the barrier, fight me / Yes, I’m a warrior, fight me” (nous construisons la barricade, combat moi, oui je suis une guerrière). Cette partie rappelle fortement le rock classique, de Queen à the Pretty Reckless et Imagine Dragons pour des exemples plus récents. 

Le deuxième couplet, quant à lui, met en avant le trio Dami, Handong et Gahyeon qui font monter la tension grâce au rap (pour la première) et à des harmonies vocales addictives (pour les deux autres). 

Dreamcatcher sont bel et bien des guerrières prêtes à affronter le mal, et ne manquent pas de nous le rappeler avec un refrain aux hauteurs lyriques. On entend leurs voix puissantes qui scandent “Justice makes me fight” (la justice me pousse à combattre). L’effet doppler (ce glitch qui coupe une note sur deux) sur leur voix pendant les notes hautes accentue cet esprit combatif, comme si elles devaient se battre contre les instruments de musique, en particulier le solo de guitare électrique, pour se faire entendre. 

Sur le dernier refrain, l’effet en question disparaît pour laisser leurs voix claires exploser. Siyeon propose une harmonie particulièrement haute et maîtrisée, asseyant son talent vocal certain. La chanson propose une production très cinématographique, propre à des films d’action ou à une comédie musicale sur ce thème.

Le MV de “JUSTICE” file lui aussi la métaphore bélligérante puisque l’on retrouve les membres dans des positions d’affrontement. Il semble être la suite directe de “Déjà Vu” qui reprend les mêmes décors et les armes chevalières comme l’épée, mais renvoie également à d’autres clips comme “Scream” avec un retour de l’arbre en feu ou de “Boca” avec l’arc. Dreamcatcher semblent avoir vaincu la couronne du mal évoquée dans “OOTD” en la détruisant directement.

On retrouve d’autres parallèles comme JiU enchaînée qui nous rappelle SuA dans “R.o.S.E Blue” ou Siyeon dans “Because”, mais aussi l’élément de la pomme croquée présente dans plusieurs clips. On pourrait la rapprocher de la fameuse pomme biblique, ou encore des pommes d’Idunn dans la mythologie nordique, qui donnent le pouvoir aux divinités de rajeunir. Yoohyeon, comme SuA semblent alors rechercher cette jeunesse et vitalité pour venir en aide aux âmes à sauver. Cette pomme, comme les armes choisies (épées et flèches) sont autant de référence à ce même univers de la mythologie nordique. 

Les insomnias tentent alors de recoller les morceaux et de faire des ponts entre tous ces indices. Il semble que Dreamcatcher arrivent enfin à se libérer de leurs chaînes, à reprendre leurs différentes armes et à véritablement combattre le mal, représenté par cette couronne tant recherchée. 

Le tout début du MV laisse apercevoir plusieurs phrases écrites en anglais qui traduisent bien l’histoire des sept protagonistes. Les formulations attachent à leur combat quelque chose de l’ordre de la destinée et du divin  : 

“May they descend as herald of justice, to exterminate evil from the world” (puissent-elles descendre en tant que messagères de la justice, pour éliminer le mal du monde)

“And guide those sacrificed by evil to their rightful fate”

(et guider ceux sacrifiés par le mal vers leur réelle destinée)

“For the souls swallowed by the abyss of malevolence” 

(pour les âmes avalées par les abysses de la malveillance)

La première phrase est posée sur une peinture romantique qu’on retrouve ensuite dans un les plans de musée d’art du clip qui n’est autre que Valkyrie et un héros mourant” de Hans Makart. Une symbolique forte donc puisque les Valkyries sont des figures féminines guerrières de la mythologie nordique. Souvent représentées à cheval, elles accompagnent les âmes des héros mourants vers le Valhalla, palais du dieu Odin. Ici, ils y deviennent “les guerriers de l’armée qui aura pour mission de combattre les forces du chaos au cours du Ragnarök.” (Joshua J. Mark). 

Le parallèle avec la mythologie nordique est d’autant plus prégnant que ce Valhalla semble être représenté par la “MAISON” dont elles parlent dans le morceau du même nom et qui est représenté à la fin du clip. Ce qui fait d’autant plus sens que le Ragnarök est la bataille apocalyptique de la mythologie nordique qui oppose les forces du bien et du mal (soit celles de l’ordre et du désordre). De ce chaos naît donc l’ordre et la justice, pour laquelle se battent les valkyries que représentent Dreamcatcher. Est-ce donc le fameux “Final fight, like final fight with us” (combat final à nos côtés) dont Handong parle dans son couplet?

Il semble donc que le MV soit rempli de références et d’éléments qui n’ont pas encore tous été élucidés et qui continuent de susciter de l’intérêt auprès des fans. Entre mythologie ancienne et ère moderne du digital qui fait suite à “OOTD” (Siyeon écoute un message d’une potentielle victime de la couronne sur son téléphone), la storyline se complexifie davantage. Sont-elles les descendantes des Valkyries ? Ou sont-elles les Valkyries elles-mêmes ? 

STΦMP!

Ce troisième morceau poursuit la thématique guerrière puisque les membres ont trouvé leur guide et sont littéralement prêtes à marcher et avancer avec détermination. “Stomp” se traduit littéralement par “piétiner” et c’est bien ce que Dreamcatcher font au Mal qui ternit le monde. Par ailleurs le “O” est en réalité la lettre “phi” en grec ; peut-être ont-elles voulu rappeler le nombre d’or, constante dans l’architecture antique et dans la nature, filant la métaphore mythologique de ce mini album

Musicalement, cette chanson reprend de nouveau des percussions et une tonalité épique. La cohérence du projet continue avec cette première b-side qui s’ouvre sur des notes de basse bourdonnantes et presque effrayantes. Les percussions formées par des applaudissements au rythme militaire mime bien cette marche, ce piétinage déterminé promis par les paroles et le titre. Les voix douces et mélodieuses du couplet sont remplacées par un refrain beaucoup plus rock avec une production musicale plus chargée. 

La musique semble accompagner les membres directement au cœur de la bataille, au cœur du chaos. Le deuxième couplet entamé par le rap de Dami et les percussions plus rapides, inspirées de la jersey club, offrent un mélange d’inspirations tout à fait intéressant. Mention spéciale au bridge qui monte en tension jusqu’au dernier refrain qui répète plusieurs fois “stomp” et “sacrifice” dans une dynamique de groupe presque militaire.

2 Rings

“2 Rings” commence directement par une instrumentale rock classique avec une mélodie de guitare électrique qu’on retrouve souvent chez Dreamcatcher. Les riffs de guitare sont non sans rappeler des groupes américains comme AC/DC dans “Thunderstruckou les Guns N’ Roses (avec “Sweet Child o’ Minepour n’en citer qu’une), voire des groupes country. La voix de SuA commence la chanson avec un timbre qui apporte ce qu’il faut de puissance et d’émotion, qu’on ne manque pas de retrouver dans leur performance dansée. 

Le refrain incorpore ensuite des éléments beaucoup plus pop-rock avec un tempo plus lent et l’utilisation du vocodeur (effet sur la hauteur des notes qui rend la voix robotique) qui donne à la chanson une direction différente. Avec ce refrain c’est plus vers des groupes alternatifs modernes qu’on se tourne, à la manière de Imagine Dragons ou The Pretty Reckless. 

L’atmosphère très rock américain de ce morceau pourrait faire penser à une taverne ou à un saloon, où les héroïnes vont se reposer et trinquer après un combat. On peut encore une fois saluer la cohérence thématique de ce mini-album qui sait filer un scénario intéressant sur toute sa durée. 

Fireflies

Pour cette ballade de fin de mini album, Dreamcatcher met en avant ses membres et leur talent de chanteuses. Chacun de leur timbre est assez remarquable pour que l’auditeur apprécie différentes couleurs et différentes techniques. La mélodie est particulièrement bien travaillée et le refrain est très joli, et donne comme une impression de repos et de calme après la tempête. L’utilisation omniprésente du piano, des voix dans un registre aérien et les falsetti rendent la chanson très émouvante. Dami, en particulier, en dehors de son registre habituel de rap, montre son talent pour les notes aiguës. 

Après avoir combattu pour la justice et offert des chansons très belliqueuses, il est temps de se reposer et de retourner à l’ordre après le désordre, de retrouver la lumière des lucioles (“firelies” en anglais). Les guerrières veulent désormais guider les autres avec leur lumière. On retrouve l’influence japonaise de l’introduction, dans le piano et les cordes synthétiques, tant cette chanson pourrait être celle d’un générique d’anime. 

CONCLUSION

[VirtuouS] est un mini-album entraînant, épique et cinématographique qui sait imposer son atmosphère dès la première chanson. Les performances des membres, alors que Siyeon est en hiatus pour se reposer, sont impressionnantes : entre notes très complexes assurées par la totalité des membres et chorégraphie exigeante, elles prouvent chaque jour leurs talents artistiques. Emmené par une title track aussi marquante que “JUSTICE”, on ne peut que souhaiter à Dreamcatcher un succès analogue à celui de “MAISON” avec [VirtuouS] !

Auteurs/autrices

  • Melanie F.

    Co-présidente partenariats et relations extérieures, je suis aussi rédactrice pour dear. korea Passionnée par la musique, la danse et les arts du spectacle, je m’intéresse à la Kpop depuis 2015, d’abord en tant que fan mais ensuite comme professionnelle de la musique. Au travers de mes articles, je souhaite partager et créer de la discussion autour des concerts, des revues musicales, mais aussi des enjeux de marketing et de communautés de fans.

    Voir toutes les publications
  • Cilly

    Rédactrice et membre du comité éditorial de dear. korea. Musicienne, passionnée par le mixage et la production musicale. Fan de K-pop mais aussi de rock, punk et variété française.

    Voir toutes les publications

Nos derniers articles